De quoi se souvient-on visuellement lorsque l’on pense ou évoque une secte ou un complot ? Comment les gourous et les complotistes utilisent-ils l’image et les médias ?
[projet toujours en cours]
Pour mon mémoire de dernière année, je souhaitais étudier le rapport au réel en photographie par le biais du souvenir et de la science-fiction. Entre anticipation d’un avenir possible, catastrophes environnementales, économiques ou politiques probables, fantasmes utopiques, et souvenirs collectifs, folklores, mélancolies individuelles, amnésie et devoir de mémoire. Par la création de fictions-documents, j’allais évoquer des faits de société de l’ordre du réel, du possible ou du vraisemblable. Je décidais de poser la question de l’illusion comme croyance, réel alternatif, ou vérité venant d’ailleurs. Je tenais à étudier la confiance aveugle en une objectivité de la photographie, en l’image comme témoin et en une mémoire infaillible.
En partant des déclarations de Fiona Broome concernant l’effet Mandela et des croyances de sa communauté (les faux-souvenirs collectifs comme preuves de sauts quantiques et d’univers parallèles), je m’intéressais au phénomène des théories du complot et des doctrines sectaires, toutes deux très proches dans leur rapport à l’image et au réel. Complotistes et adeptes de sectes utilisent leurs croyances comme interprétations, solutions et explications de notre univers. La doctrine et la théorie devenant un genre à part de documentation des faits historiques et d’actualités qui nous entourent. Pour les complotistes rien n’est tel qu’il paraît être et j’allais jouer avec cette devise pour ce projet.
Les réseaux sociaux et les internets actuels alimentent une circulation de l’information (vrai ou fausse) extrêmement rapide et non contrôlée, et favorisent une hyperméfiance des grands médias « esclaves des politiques ou des actionnaires », pourtant utilisés à la fois par les complotistes et les sectes (manipulation, propagande, détournement, etc…). Leaders de sectes et complotistes exploitent les images comme justifications et preuves de leurs vérités, tout en accusant d’autres visuels d’être mis en scène et donc faux. Pourtant sectes et théories du complot se valent par leur manque de preuves concrètes irréfutables, attendant des non-croyants l’apport de la preuve contraire.
Par ce projet Souvenir de… j’allais créer des preuves de l’existence de différents complots (réels ou non), mais aussi de faux souvenirs de sectes ou d’évènements qui leur sont liés, en jouant leur propre jeu du contexte de monstration : apporter la preuve d’une mise-en-scène par une mise-en-scène et déclencher le souvenir à partir de faux documents, utiliser le lien texte/photographie pour en changer le sens, ajouter au millefeuille argumentatif qu’ils proposent, sous la forme d’une enquête policière ou journalistique et créer une fiction au service d’une certaine réalité.